• L'accord Pythagoricien

     

    L'accord Pythagoricien, en vigueur depuis l'antiquité jusqu'à la renaissance, a été inventé et développé par Pythagore, philosophe et mathématicien grec (570-495 avant JC).  Une de ses théories était que tout dans la nature était régi par des relations mathématiques. Nous savons maintenant, que la nature ne se laisse pas totalement enfermer dans un modèle mathématique. 

    Pythagore a construit une gamme musicale,  composée de tons et demi-tons, qui a survécu jusqu'au moment où la musique s'est complexifiée grâce à la polyphonie et à l'utilisation de plusieurs instruments simultanément. Cette gamme rendait difficile toute transposition, et n'était plus toujours consonante. 

    Grâce à l'observation acoustique des marteaux d'un forgeron, Pythagore a fondé son système sur deux accords consonants : l'octave et la quinte, tous deux facilement accordables par une oreille un peu exercée (les anciens ne connaissaient pas le diapason).  Par ses recherches, à l'aide d'un monocorde à chevalet variable, il a déterminé que l'octave, intervalle consonant par excellence, avait un rapport de fréquence vibratoire de 2/1, et que la quinte, intervalle consonant également, avait un rapport de fréquence vibratoire de 3/2 (soit 1,5).  Les fréquences vibratoires sont exprimées en hertz (1 Hz = 1 vibration par seconde).

    Si nous partons du Do 260 Hz, pour obtenir l'octave nous multiplions la fréquence par 2, ce qui nous donne un Do présentant une  fréquence de 520 Hz.  Pour obtenir la quinte, nous multiplions cette fréquence par 1,5  (260 x 1,5 = SOL 390 Hz). Nous continuons le cycle des quintes en multipliant le SOL 390 Hz par 1,5 ce qui nous fait un RE à 585 Hz. Pour avoir le RE de la première octave, nous devons diviser cette valeur  par 2, soit un RE 292,5 Hz.  L'intervalle entre le DO et le RE est donc  292,5/260 = 9/8 (cette valeur étant le rapport des fréquences de deux notes distantes d'un ton pythagoricien)

    On peut continuer à déterminer les autres notes en calculant toujours la quinte de la quinte. Finalement on aura toutes les notes de la gamme et tous les dièses : DO - SOL - RE - LA - MI - SI - FA# - DO# - SOL# - RE# - LA# - MI#(FA) – Mi #-SI# (DO).

     

    Accord Pyhagorien 2

     Figure 1

     

    A l'inverse, si on recherche les quintes en descendant on obtient : DO - FA  - Sib - Mib - Lab  - Réb  - SOLb  - Dob (SI) - Fab (MI). 

    Le problème, c'est que la fréquence acoustique du MI# n'est pas exactement la même que celle du FA que l'on trouve par quinte descendante ; tout comme le SI# n'est pas exactement le DO de départ. Et le Dob n'est pas exactement le SI de notre recherche par quintes montantes. On constate donc, par calcul, qu'un dièse est différent d'un bémol dans ce mode d’accordage des tons.

    Dans le tableau qui suit on voit bien la position des tons et demi-tons  de la gamme de Pythagore en comparaison avec ceux du système « bien tempéré » expérimenté et développé par J.-S. Bach (1685-1750). Dans ce système « bien tempéré », la quinte n'est plus obtenue en multipliant la fréquence de base  par 1,5, mais bien par 1,498 et chaque 1/2 ton est divisé en 100 parties appelées cents. Les 12 demi-tons de la gamme sont par définition rigoureusement égaux. L'intervalle de l'octave est donc de 12x100 = 1200 cents et celui de la quinte de 700 cents.

     

    Accord Pyhagorien 2

     Figure 2

     

    Par exemple, on voit bien que le Mi pythagoricien est environ 4 cents plus haut que le Mi bien tempéré. 

    Autre exemple, : le Ré# est 13,685 cents plus haut que le Ré# tempéré et que le Mib est 9,775 cents plus bas que le Mib tempéré.  La différence entre les  Re# et le Mib pythagoriciens  est dès lors de 13,685+9,775, soit 23,46 cents, qui est la valeur du comma traduit en tempérament égal.

     

     

    Accord Pyhagorien 2

    Figure 3  (r = rapport de fréquence)

     

     

    Accord Pyhagorien 2

    Figure 4  (r = rapport de fréquence)

     

    Quels sont les carillons accordés selon le mode pythagoricien ?

    Géo Clément, carillonneur de Mons et Tournai, fondateur de la première école de carillon de Wallonie, à Mons, a été le maître d’œuvre des carillons de Soignies, Braine-le-Comte, Gembloux, Nieuport, Florenville,... Il a explicitement demandé dans les cahiers des charges que ces carillons soient accordés selon ce mode ancien.  Puisque l 'accord pythagoricien fait la différence entre les # et les bémols,  il a fallu opérer des choix ;  Géo Clément a voulu un accord qui permette de jouer en mode pythagoricien en DO, FA, SOL, RE, Sib et, MIb. , , tonalités qui n'ont pas beaucoup d'altérations (en l’occurrence Fa#, Do#,  Sib ;  Mib ; Lab).  Le premier cahier des charges a-t-il été respecté ? Peut-être aurions nous des surprises car ce cahier des charges a été transmis au successeur de Marcel Michiels qui sur le plan technique n'a pas du tout construit  notre instrument conformément à ces instructions bien précises.

    D'autres carillons anciens furent  probablement accordés selon ce mode :

    Le moyen le plus adéquat de le savoir, est d'analyser les rapports de  fréquences des intervalles des tons entiers (DO-RE ; Re-Mi ; FA-Sol ; Sol-La ; La-Si) qui doivent être de 9/8, et voir si les quintes sont bien dans le rapport de fréquences de 3/2.  C'est un travail qu'il est possible de faire grâce à un petit logiciel d’analyse de fréquences   acoustiques.

     

    Accord Pyhagorien 2

    Figure 5